Lynch : la bonne pioche de l’UST

Voilà maintenant près de deux mois que Jeremiah Lynch, un puissant 3e ligne australien, a débarqué à Roissy. Confinement oblige, il a fallu du temps pour l’établissement de ses papiers. Depuis le 7 décembre, tout est en règle. La recrue australienne n’attend plus que le feu vert de la FFR pour que le championnat ne reprenne et qu’il puisse débuter sous ses nouvelles couleurs. Avant de voir en action ce joueur si prometteur, partons à sa découverte.

Recommandé par Steve Baker. Quand Paul Girardeau, début septembre, a annoncé au staff qu’il ne repartait pas pour la saison, la question de dénicher un deuxième ligne de remplacement s’est posée. Après accord du club et du staff, Pascal Sassi a aussitôt activé ses réseaux à l’étranger. Notamment Steve Baker, l’ancien numéro 9 néo zélandais de l’UST, qui réside à Christchurch, troisième ville du pays du Long Nuage Blanc. Le hasard a voulu que Jeremiah Lynch, arrivé en début d’année en Nouvelle Zélande, avait été recruté par le Marist Albion.

« Quand Pascal m’a contacté, raconte Baker, j’ai de suite songé à Lynch. Grâce à lui, pour la première fois en vingt ans, Christchurch Marist a atteint la finale. Ses prestations de haut niveau ont impressionné tout le monde à commencer par Canterbury, qui lorgnait sur lui. Jerry est un joueur puissant, très mobile, très adroit pour un grand. Redoutable franchisseur, il sait aussi plaquer et faire le lien entre avants et trois quarts. » Très élogieux, Baker avoue même qu’il ne lui connaît peu de faiblesses.

Le discours de l’ancien numéro 9 de l’UST a visiblement séduit Franck Cohen. Comme Lynch a de suite été séduit par l’idée de venir en Europe, l’affaire a été rondement menée. Le 21 octobre, Benoît Sébillet, le président, allait le chercher à Roissy en compagnie de Bruno, son frère et de Thierry Libreau, le trésorier. « Il s’agit de mon premier voyage en Europe », confiait Lynch, lors de sa rapide traversée de Paris et de son transfert sur Tours.

Un béret basque en cadeau de bienvenue. Ne parlant pas un traître mot de français, Lynch a connu une période d’adaptation plus que délicate, d’autant que, deux jours après son arrivée, le pays était confiné. « J’ai été remarquablement accueilli par Thierry, mon logeur, et sa famille commente ce solide gaillard (1,94m, 110 kg). Ils sont aux petits soins pour moi. Je ne manque de rien. Il me concocte des petits plats et m’a déjà fait découvrir les produits du terroir. J’apprécie son sens très poussé de l’hospitalité. » Jerry – c’est son surnom – a vite été pris en main. Si, à Rockampton dans le Queensland, au nord de l’Australie, d’où il est originaire, il ne buvait que de l’eau et du lait, il a vite apprécié le … vin rouge. Lors de son repas d’intégration, les frères Sébillet lui ont vite offert un béret basque, qu’il arbore avec fierté quand il sillonne la ville en vélo.

Jerry a vite pris ses marques. Venir en France pour apprendre notre langue était sa priorité. Aussi, depuis son arrivée, il fréquente l’Institut de Touraine, rue de la Grandière, à raison de quinze heures par semaine. Chez Thierry Libreau, Jerry regarde avec assiduité infos et films sous titrés pour progresser. « Bonjour, une baguette s’il vous plaît » ont été ses premiers mots. Pour l’avoir croisé récemment afin de faire plus ample connaissance, je peux affirmer que le garçon respire la joie de vivre. On le sent heureux d’être en France, impatient de découvrir les Châteaux de la Loire et de se familiariser avec les us et coutumes de notre pays. Il apprécie déjà fromages et charcuterie. Guère avare de plaisanteries, pour montrer qu’il s’était déjà familiarisé à la vie tourangelle, il a tenu à poser pour la photo avec une baguette sous le bras, un camembert et une « quille » de rouge dans chaque main.

Il appréhende les fêtes de fin d’année. Troisième enfant d’une fratrie de quatre derrière ses deux frères aînés, Owen et James et sa sœur cadette, Patria, Jerry a toujours aimé les réunions de famille. « Nous sommes très soudés, avoue-t-il avec fierté. Je suis très proche de mes parents, qui possède une ferme avec des vaches et des moutons. J’adore m’en occuper. Malgré l’éloignement, je les contacte très tôt le matin en raison des neuf heures de décalage. Pour Noël, la famille va me manquer, assure Jerry. Heureusement que Kelly, mon amie, m’a rejoint au début du mois. Je serai moins seul. »

Après, on sent que Lynch, qui a dernièrement emménagé à la Riche, à deux pas de Tonnellé, a envie de pouvoir rejouer – son dernier match remonte à octobre avec Canterbury – et de faire plus ample connaissance avec ses entraîneurs et ses futurs partenaires. Avant de se présenter plus longuement et de retracer son parcours, il annonce déjà la couleur. « Mon poste de prédilection est troisième ligne aile, mais je peux également opérer deuxième ligne et numéro 8. De toute façon, je veux me fondre dans le collectif et aider Tours à monter en Fédérale 2. Je suis venu pour deux ans, mais j’aimerais rester plus longtemps. Je suis vraiment passionné par ce sport. Alors, j’aimerais voir où cela pourrait m’amener. »

Passionné de surf et de natation. « Lors de mon adolescence, raconte Lynch, j’ai pratiqué différentes disciplines (cricket, natation, football), mais ma passion demeure le rugby et je ne me voyais pas faire autre chose, même si, l’été, j’aime bien nager dans l’océan et faire du surf. En fait, je suis tombé amoureux du rugby, dès l’âge de 9 ans. Pendant mes études, c’était difficile de tout concilier avec les entraînements, surtout quand j’étais obligé de modifier mon engagement professionnel pour pouvoir réussir dans le sport. »

Baker, l’agent de liaison

Séduit par Chabal. Devenu ingénieur en génie civil, Lynch intégrera ensuite le championnat national. Après trois ans à Brisbane et une saison au Queensland, il déménage en Nouvelle Zélande, pour évoluer au sein de l’équipe de Marists Albion’s Premier Grade. « En septembre, précise Lynch, nous sommes parvenus en finale, où nous perdons d’un point. » C’est là, précisément à Christchurch qu’il rencontrera Steve Baker.

« Il m’a raconté son incroyable expérience en France et particulièrement à Tours, il en garde de merveilleux souvenirs. Personnellement, j’appréciais beaucoup la puissance et le style de jeu de Sébastien Chabal et comme je rêvais de venir tenter l’aventure en France, je n’ai pas hésité longtemps quand Baker m’a parlé de Tours. » Voilà comment Jerry a atterri en Touraine.

Dès que la vie reprendra son cours, Lynch a programmé d’aller à Bordeaux pour revoir son ami et compatriote Scott Higginbotham, actuel numéro 8 de Bordeaux-Bègles, avec qui il a joué aux Queensland Reds. International à 34 reprises, ce puissant troisième ligne centre a notamment joué contre le XV de France, lors de la déculottée mémorable (59-16) subie par l’équipe de Thierry Dusautoir, en novembre 2010 au stade de France.

A l’approche des fêtes, tout le monde au sein du club tourangeau piaffe d’impatience de voir Lynch en action. A la lecture des vidéos, l’Australien a tout pour casser la baraque. Après tout, si c’était la bonne pioche et le cadeau de Noël avant l’heure pour l’UST.

Réponse dans deux mois environ. Il se murmure que le championnat pourrait reprendre le 7 ou 14 février.

BERTRAND BOURGEAULT (avec ALESSIA ARINA)

Benoît Sébillet, le président de l’UST (à g.), tout sourire au moment de la signature de Lynch (à dr.) (Photo Régis Radureau)
Lynch, en promenade à vélo, devant le jardin Botanique.
Benoît Sébillet, tout heureux de faire découvrir Tonnellé à Lynch et de lui offrir son premier maillot (Photo Régis Radureau)
Thierry Libreau (à g.) montre à Jerry Lynch (à dr.) la distance entre l’Australie et la France. Plus de 17.000 kms (Photo Bertrand Bourgeault)
Lynch (à g.), à sa descente d’avion, est accueilli à Roissy, le 21 octobre, par son président, Benoît Sébillet.
A l’aile de la troisième ligne, Lynch met un genou à terre. Une attitude que l’on a hâte de voir.