Membre à part entière de l’équipe de France à 7, Pierre Gilles Lakafia, actuellement blessé, a dû renoncer à la tournée asiatique. Resté se soigner en Touraine chez son ami Thomas Soulié, il n’est pas surpris des places de finaliste obtenues à Vancouver, puis à Hong Kong et, enfin, de la neuvième place, ce dernier week-end, au tournoi de Singapour, après la victoire devant l’Ecosse (22-19). Premier supporter des Bleus, Lakafia explique les raisons de cette métamorphose et évoque son avenir et ses ambitions. Morceaux choisis.
A Las Vegas, début mars, on a touché le fond. « Curieusement, en poule, nous n’avions pas fait un mauvais tournoi. Nous n’étions pas loin. Que ce soit contre l’Argentine (17-15) ou contre les Etats Unis (19-10). A chaque fois, nous perdons à cause de cartons, mais nous avions mis les Américains en difficulté. C’était prometteur. Reversés en Trophy (matches de classement), nous avons lâché. Il n’y avait plus l’enjeu du podium et, du coup, nous avons manqué de détermination. Nous avons touché le fond, au point de perdre contre le Chili (17-12). A l’arrivée, nous terminons quinzièmes. Très déçus et marqués par ce résultat, nous avons alors décidé de nous réunir, sans les coaches, pour laver notre linge sale en famille, autour d’un verre. Nous nous sommes dit notre quatre vérités. Cela n’a pas été forcément agréables à entendre. »
Le déclic a lieu à Vancouver. « Le lendemain, nous prenions l’avion pour Vancouver. Dès le premier entraînement, dans le vent et sous la neige, nous avons senti qu’il se passait quelque chose. Dans des conditions difficiles, curieusement nous étions appliqués, il y avait de l’envie et de l’enthousiasme. Arrivent alors la compétition et, d’entrée, les Néo Zélandais. Nous prenons une déculottée (33-5), mais, à chaque fois, que nous avions le ballon, nous sentions que nous étions en mesure de leur mettre la pression. De ce match, nous sommes ressortis regonflés. Ensuite, nous défions l’Australie et nous triomphons de justesse (21-17). Battre cette nation majeure du rugby à 7 a été le déclic. Nous n’avons pas explosé de joie, mais, intérieurement, l’immense bonheur du devoir accompli nous habitait. Dans la foulée, nous tombons sur l’Espagne, qui venait de s’imposer contre les All Blacks (26-24) et là, nous sortons un match plein de maîtrise, nous les avons éteints. Huit jours après été au fond du seau, nous étions qualifiés pour aller chercher un podium. »
Une première médaille d’argent en récompense… « Nous étions en phase finale. Notre approche changeait. Nous avions décidé d’aborder les matches sans se mettre de pression, nous avons joué libérés. En disposant des Samoans (35-12) en quarts de finale, nous avons envoyé un signal fort à nos adversaires. En demi finale, nous affrontons les Etats Unis. L’adversaire semble intouchable, car les Américains ont joué toutes les finales depuis le début d’année. Nous leur mettons (33-5). Nous les avons étouffés, avec une pression tout terrain, ils n’ont pas existé. A ce moment-là, j’ai ressenti l’impact psychologique que nous avions sur nos rivaux. Subitement, ils nous ont regardé différemment. De notre côté, nous nous sentions dominants.
Pour la première fois depuis 2012, nous étions en finale. Face à l’Afrique du sud, une nation majeure du rugby à 7. Phénoménal. Dans le vestiaire, nous étions comme des gosses. On se disait, c’est génial, nous avons les clefs du stade, nous fermerons quand nous aurons envie. Pour garder du jus, nous n’avons pas tout donné dans la Marseillaise. Nous avons tenu le ballon, mais, sur la fin, ils nous plantent deux essais. Nous perdons (21-12), sans avoir démérité. Cette médaille d’argent venait récompenser tous nos progrès. »
Puis une seconde à Hong Kong. Huit jours plus tard, les coéquipiers de Jean Pascal Barraque récidivaient lors du Tournoi de Hong Kong. En quarts, ils sortaient les Samoans (19-12), avant de réaliser l’exploit d’éliminer les All Blacks (14-12) en demi finale. Avant de subir la loi des Fidjiens (21-5) en finale.
Le Tournoi de Paris, prochain objectif de Lakafia. Au repos forcé, Pierre Gilles Lakafia a suivi les exploits de ses potes. « Je regrette bien sûr de ne pas avoir été de l’aventure, déplore l’international formé à l’US Tours. Hong Kong reste le tournoi le plus prestigieux au monde, c’est là où j’ai débuté. Il se joue devant 40.000 spectateurs. Il reste la référence. Comme je souffrais d’une entorse à la cheville gauche et du genou droit, il était préférable que je me soigne pour être d’attaque pour la fin de saison. Depuis deux ans, je manque le Tournoi de Paris (1 et 2 juin). Cette fois, j’espère bien être en forme et pouvoir le jouer, tout comme celui de Londres (25 et 26 mai). »
Lakafia n’a pas tort. En toile de fond, les Bleus visent le Tournoi de qualification pour les JO.
En attendant, Lakafia a mis les bouchées doubles en se rendant plusieurs fois par semaine au Centre Sport et Santé, Melting Forme à Tours, de ses amis Thomas Soulié et Claire Longomba. Et il espère bien rattraper le temps perdu et remonter dans le bon wagon…
Bertrand Bourgeault